Mobilisation à Bourg-en-Bresse
Changement annoncé au sein de l'état-major de l'usine de la route de Lyon, accidents du travail, projet de cession d'une partie de l'activité. Les 403 employés de l'historique tréfilerie s'interrogent…
La campagne des Européennes a été hier l'occasion d'un rassemblement du Front de Gauche devant l'usine / Photo J.-M.P.
Arcelor Mittal est un peu à Bourg ce que Peugeot est à Sochaux… L'ancienne tréfilerie, fondée par la famille Chaudouet, il y a 104 ans, n'est pas épargné par la crise, notamment depuis son entrée dans le giron du géant mondial de l'acier, l'Indien Mittal.
Au cours des derniers mois, Mittal a fermé en France plusieurs sites : Florange, Lens, Gandrange (malgré, on s'en souvient, les promesses du Président de la République). Le groupe a annoncé la fermeture de la frappe à froid à Marnaval.
Du coup, les métallos burgiens s'inquiètent. Plusieurs éléments, confirmés par les syndicats, alimentent leurs craintes. Arcelor Mittal ne cache pas par exemple sa volonté de rendre autonome une partie de son activité à Bourg. Un choix que le comité d'entreprise doit entériner.
Il s'agit en l'occurrence de TES, Tréfil Europe Service, pourtant pour beaucoup dans la bonne image de marque de la maison sur le marché du câble. TES fait dans le pointu en installant et entretenant ses câbles en montagne et sur les plateformes pétrolières. Une sorte de service après vente qui peut, selon les périodes et le niveau du marché, rapporter ou au contraire coûter des fortunes.
L'angoisse du personnel est également alimentée par les mouvements à la tête du site bressan. Certes, la peur n'évite pas le danger, mais n'empêche…
L'actuel numéro un, Pierre Bely, devrait être remplacé à l'automne par Jean-Luc Dieudone, un ancien de Florange. Une origine qui n'inquiète pas Force ouvrière : « C'est un homme de terrain, un lamineur de formation qui peut nous apporter beaucoup. Et ça nous changera des commerciaux… »
La direction des ressources humaines (DRH) change également de main suite au départ volontaire du locataire du poste, Eric Liflard, remplacé par Pascal Marchesin. Idem au service qualité avec le départ d'Isabelle Vergès.
« Le climat est au regroupement, à la mutualisation des services pour réaliser des gains de production » constatent les élus du personnel.
Ceux-là même qui écartent pourtant la menace d'un retour au chômage partiel : « C'est fini depuis février. Des commandes sont tombées et les départs volontaires se poursuivront jusqu'à fin juin. » En revanche, l'accumulation des accidents du travail reste le sujet qui fâche : « En 2008, le site de Bourg en a déploré 38. De janvier à mars 2009, nous en étions déjà à 17. En avril, 15 de plus se sont produits. Ce qui fait déjà 32 ! (Lire par ailleurs) Le personnel est trop stressé. Il y a des doigts coupés, des bras pris dans les machines. S'il y a problème de comportement, c'est du côté de la direction qui ne favorise pas les bonnes conditions de travail dans un contexte tendu » ajoute-t-on à Force ouvrière.
Jean-Marc Perrat
Mobilisation « électorale » hier devant l'usine de la route de Lyon
Crise faisant, la situation de l'usine Arcelor Mittal de Bourg, avec ses 403 employés, ne pouvait échapper aux soubresauts de la campagne des élections européennes du dimanche 7 juin.
La liste du Front de Gauche dans la circonscription du Sud-Est n'a pas manqué l'occasion qui lui était offerte hier en fin d'après-midi.
Vers 17 h 30, les banderoles et les pancartes ont été déployées devant l'une des grilles de l'usine de la route de Lyon. Les candidats et les militants espéraient croiser des métallos sortant du boulot et lâcher par ci par là la bonne parole de l'union entre le Parti communiste, le Parti de Gauche et la Gauche unitaire.
En première ligne, la tête de liste Marie-Christine Vergiat, fraîchement rentrée d'Oyonnax et prête à remettre le couvert sur la scène de la salle du Vox pour un meeting public.
À ses côtés, le numéro quatre Claude Debons, secrétaire national du PG, et Sylvie Pierron, l'une des étoiles montantes du PCF dans le Rhône, cinquième sur la liste. Franck Pupunat, l'ancien du PS d'Oyonnax, chef de file de la motion Utopia, passé depuis chez Jean-Luc Mélenchon, était aussi de la fête.
Une délégation a voulu être reçue par la direction de l'usine. En vain. « Notre présence ici est symbolique, affirmait Marie-Christine Vergiat. L'alternance entre chômage partiel et reprise de poste ne fait rien pour éviter les accidents du travail dans ce type d'entreprise. C'est sur ce thème que nous voulions rencontrer les responsables. »
J.-M.P.
La direction du groupe n'est pas rassurante
Les inquiétudes autour des rumeurs de menaces à moyen terme sur le devenir de l'usine Arcelor Mittal de Bourg sont-elles fondées ? Difficile d'avoir une réponse de la part du géant mondial de l'acier. Lorsque l'on va à la pêche aux informations auprès de la direction de Bourg-en-Bresse, le renvoi est immédiat sur Saint-Denis en banlieue parisienne. Puis direction le siège, au Luxembourg, qui renvoie à… Luxembourg. Et là, c'est de nouveau direction Saint-Denis qui, cette fois, propose un retour à Bourg. Finalement, le service presse est bien compétent pour évoquer l'actualité des usines Mittal, dont notre bonne tréfilerie, chère au cœur des métallos bressans.
Compétent, mais pas bavard. Tellement pas bavard que quasiment muet malgré de multiples sollicitations téléphoniques et envoi de courriels. Quasiment seulement… On apprend tout de même que le directeur de l'usine au 1er septembre sera bien M. Dieudonne. Mais pas plus sur les mouvements à la direction. En revanche, désaccord total avec Force ouvrière sur le nombre d'accidents : « Avec arrêt, ils sont au nombre de huit depuis le début de l'année. » Quant à l'éloignement de TES… « Aucun projet de vente n'était à l'ordre du jour du CE (ndlr, de jeudi matin). » Qui a parlé de vente ? Voilà qui ne calmera ni l'angoisse, ni la sinistrose.
J.-M.P.